Que veux-tu que je te dise ?
À force de soirs,
notre amour s’est éteint
comme une petite bougie ;
nous n’allons pas le réveiller
il dort si bien.
Catégorie : Amor
Griffée
Griffée de mots crus
Qui pulvérise mon être
de désamour
Je ne sais si j’aurais le coeur
de remonter
à la surface.
Parfois l’amour s’endort
Parfois l’amour s’endort
au port
Rassasié d’un quai,
saura-t-il repartir
pour de plus vastes mers ?
Tu es mon île
Tu es mon île
ma base et mon sommet
l’endroit hautement sensible
qui me ceint
qui me sied
l’amer d’amour
qui me guide, qui m’arrime
à l’aventure d’une vie
et dans cet espace si incertain
l’ivresse
d’une nouvelle mer à franchir.
Les pieds dans l’eau claire
Les pieds dans l’eau claire
Tu me troubles
Avec pudeur
Avec stupeur
Avec candeur
Tu me troubles
Ma curiosité intacte
de ta forme étrangère
ta pupille bleue qui m’enserre
Désir élémentaire.
Extase
J’aimerais que tu m’allonges
dans un de tes tableaux
que toi seul sait faire
sur une forêt immense
qui recouvrirait la terre
J’aimerais que tu traces mes lignes
au fin trait de ton pinceau
que ce trait me dessine, me désigne
et me libère
de la surface de la terre.
J’aime cet arbre
J’aime cet arbre,
nourri d’ombres et de silences
J’aime cet arbre,
la douceur qu’il infuse à mon paysage
J’aime cet arbre
dont les racines empaument mes collines
J’aime cet arbre, ramure de mon sexe,
qui célèbre chaque jour ma nudité de brindille
J’aime cet arbre
qui polirait pour moi au galet toute une colline
J’aime cet arbre
qui me ramène à ma condition de glaise fine
J’aime cet arbre, mon amant de terre crue que je fis naître – moi, colline – et auquel je suis suspendue.
En chemin
Mon amour,
nous voilà au carrefour des trapézistes.
Te sens-tu prêt aux multiples sauts,
malgré cette queue absente
– archive préhistorique –
qui nous pend au coccyx ?
Nulle trace de chemin,
n’est-ce pas mon amour ?
Nous abreuvons des racines.
Assis là, mon amour, nous frayons notre possible,
la voie d’un vivre.
Que le vent se lève et emporte notre mémoire, au loin.
Blanche, cette maison
Blanche, cette maison dans laquelle je suis assise
Simple, innocente, pure
En elle, les traversées étaient toutes possibles.
Savions-nous, mon amour
ce qu’elle allait devenir ?
Portait-elle en elle-même l’ombre des ruines
comme chaque mort contient la vie ?
Pourtant agrandie cette maison,
ramifiée de portes, de couloirs,
de solides colonnes,
de fenêtres toujours
et de frontons d’utopies.
Dessinée, cette maison,
fallait-il y vivre ?
Les charpentes tombent en ruines.
Est-ce la vrillette de l’amour
qui consomme nos pelles de sable des jours après jours ?
Une grosse feuille a poussé nette
– ou une racine peut être ? –
aurait-elle infiltrée les murs ?
Ce soir, je suis assise
au milieu d’elle
et elle au milieu de moi
cette maison à son tour me dessine
je devine ses fissures
goutte à goutte, elle s’infiltre :
il faut que j’ouvre la fenêtre
pour boire.
Salie
Salie
notre histoire
insultes
coups bas
de vexations en vexations
nous perdons notre trace
Je ne veux pourtant plus me voir
miroir de ton œil mâle
je ne veux plus exister
dans cette ornière
dans cette visière
qui m’englobe et m’enserre
et de père en père
je libère mon joug
ma joue
de tant d’étreintes
pourtant si affables et sincères
mais qui menace
ma femelle universelle
ma lionne carnassière
mon étoile légendaire
ma nuit, ma lune et ma voix entières
car je désire rester penchée là
à la fenêtre de mon mystère.