Tu n’es pas une guerrière
l’âme te manque
à faire mal
tu es une douceur rétractile
touchée à la lutte.
Auteur/autrice : silanxieuse
Fluide
Dans une semaine ou peut-être plus
la Terre viendra à nouveau frapper
à ma porte
pour m’apporter de l’eau
– coulera de mes mains ce cadeau.
Ode
Tu mériterais une ode
pour ton petit corps pâle
pour l’ombre discrète qu’il répand en caresses
sur la terre, les fleurs, les arbres, les êtres
tu mériterais une ode
pour tous les mots que tu dis
qui abreuvent le terreau de mon être-puits
tu mériterais une ode
pour la douleur illégitime que tu portes
pour tes cris sans bruit
pour ta colère mélancolique
pour la patience que je t’envie
pour l’obstination de ton désir
tu mériterais une ode
et voilà celle que je t’écris.
Tu es
Tu es le brouillard à ma cime
l’humus à mon pied
l’eau qui irrigue mes racines
sans conscience
du bienfait
que tu portes.
L’autel
L’autel de la normalité
– un épouvantail dans un champ de blé.
Maus
Tu es goulu mon petit état
tu voudrais choisir en tous lieux
la juste place pour moi
ton hémicycle est trop étroit
tu voudrais mon siège, ma voix
mais tu n’auras pas mon courage qui se bat
contre tes lois de chat.
Trois huit
Tu sais que tes poèmes doivent exister
sinon c’est toi qui meurs
Écris-les dans ta cuisine
fille d’usine
écris ton désir d’expression irrémissible
éclaire ton rêve d’être un outil servile
qui s’émancipe
mais ne cherche pas ton rang, ton sexe, ton nom
dans les rayons de l’érudition
ta poésie ne trouvera pas de porte
– sinon morte
pour entrer dans cette légion
trop féminine
pas dans le ton
ce qui se vend, s’exprime
tu ne décides
Fausse bourgeoise
poème prolétaire
âme qui trime.
Nous répandons
Nous répandons nos imprécations
dans la terre de la nuit
dans l’argile des mots
trop petits pour nous contenir.
Notre divinité de monstresse
en plein jour
n’est pas visible.
Si nous étions ce que nous sommes
ensevelies
si le jour renversait la nuit
vestales de sorts fertiles.
La course aux mirages
Civilisation outrancière
ta vanité
ne t’empêchera pas
de finir sable.
Je ne crois pas avoir appris
Je ne crois pas avoir appris
ce que je voulais savoir
tant de choses à connaître
mais que veux-tu apprendre ?
Savoir ne peut pas être
déglutir un poème dans un couloir
trier des fruits secs pour les ranger dans un tiroir
peindre la même pomme avec un même pochoir
retenir des titres de chapitres en guise d’Histoire.
Je peux te transmettre
ce que je découvre moi-même avec joie
– pas de monopole au savoir –
et du haut de ton petit âge
découvre la sagesse qui fera de toi
un puits de joie
goûte, bouge, éprouve
expire, exprime, expérimente
trouve des maître.sse.s qui n’en sont pas
sois le gardien de toi-même
la gardienne de ton phare
– le plus sûr chemin pour arriver à soi.