Avant toi,
le temps gisait à profusion
et je ne maugréais pas.
Avant toi,
je n’avais pas peur de la mer
ni de l’orage
ni du froid
ni du vent qui cogne contre la montagne
et je ne distinguais pas le message des lunes.
Avant toi,
mon corps était seule
et l’amour était flamme, tempête et vague.
Avant toi,
les scarabées et le nombre de leurs pattes m’importait peu.
Avant toi,
je ne savais pas être là,
construire inlassablement des barrages
répéter des couleurs, chanter des noms de fleurs.
La responsabilité ? Je n’en avais pas.
La fatigue ? Je ne la connaissais pas.
Je dormais repliée sur ma peur,
elle ne cernait que moi.
Je ne savais pas la violence
Je méconnaissais mon histoire
Grâce à toi, je prends souvent l’enfant que j’étais dans mes bras.
Avant toi, je pensais pouvoir dire et saisir
Et me voilà dans l’océan de l’innommable
Avec mes doutes qui gesticulent en moi
Construire et sans cesse tout remettre à plat
Et entre temps cuisiner de bons petits plats
Vertige de douceur
Amertume et joie
Je vois bien que la terre n’est ronde
qu’à travers toi.